Tout d’abord, il est important de comprendre que le suicide est le résultat d’un processus.

Comme vous le savez déjà, la vie est faite de hauts et de bas, auxquels nous devons tous faire face. Mais parfois, nos problèmes sont si intenses et si nombreux qu’ils épuisent nos ressources et nous avons du mal à retrouver notre équilibre psychique. Ce déséquilibre peut nous faire perdre nos capacités habituelles à faire face aux problèmes stressants, et l’on se retrouve dans un état où les premières idées suicidaires peuvent émerger. Les solutions  trouvées s’avèrent insuffisantes ou inefficaces pour soulager notre souffrance. Nous pouvons alors nous sentir désespéré et incapable de voir d’autres alternatives à nos problèmes que la mort. C’est ce que l’on appelle la crise suicidaire.

La crise suicidaire c’est donc le désir de vivre qui est éclipsé par le désespoir. 

En tant que proche, dans ces moments là, que pouvons-nous faire ? 

Proposer un espace de parole peut tout changer ! 

En tant que proche, nous pouvons également agir pour aider une personne qui a des pensées suicidaires. Pour une personne qui présente des pensées suicidaires, il est souvent très difficile d’oser en parler, par peur d’être jugée ou incomprise. C’est pourquoi elle va parfois communiquer de manière détournée ou indirecte. Si vous repérez des paroles ou des comportements inquiétants, il est important de ne pas les ignorer et d’ouvrir la discussion avec la personne.

Vous l’aurez compris, avoir quelqu’un à qui parler peut faire une grande différence.Gardez en tête que parler de suicide ne poussera pas quelqu’un à se suicider et ne lui donnera pas d’idées suicidaires. Inversement, il n’est pas vrai non plus que les gens qui parlent de se suicider ne passeront pas à l’acte. Le soutien des amis et de la famille est l’une des meilleures protections en prévention du suicide. Il est cependant normal d’avoir des craintes car ce n’est pas un sujet facile à aborder. Parler de suicide avec l’un de vos proches, ce n’est pas lui suggérer l’idée, mais au contraire lui ouvrir la porte à l’expression de sa souffrance et au soulagement.

Mais quoi dire ? Et quoi faire ? 

Etape 1 : Entamez une conversation

Pour entamer la conversation, choisissez un cadre agréable et sécurisant, où vous avez peu de chance d’être interrompu. Par exemple : au téléphone, autour d’un café chez vous où chez la personne, dans un espace extérieur au calme et sans trop de monde autour.

Vous mentionnez ce que vous avez remarquésans le juger ni le faire culpabiliser (très important). Par exemple :

  • « Je ne t’ai pas beaucoup vu ces derniers jours. Est-ce que tout va bien ? »
  • «Depuis que ton copin ta quitté, j’ai l’impression que tu vas mal. Veux-tu qu’on en parle?»
  • «Je suis inquiète pour toi. Est-ce que tu vis des choses difficiles ?». 

Etape 2 : Entretenez la discussion et reconnaitre les émotions 

Vous posez des questions ouvertes (autrement dit « pas oui ou non) et écoutez les réponses de la personne. Par exemple :

  • «Tu n’es plus le même. Je m’inquiète. Qu’est-ce qu’il se passe ?»
  • «Tu sembles traverser un moment difficile. J’aimerais que tu m’en parles.»
  • « L’autre jour, tu m’as dit que ta vie était moche. Qu’est-ce que ça veut dire pour toi ? »
  •  « Ça semble vraiment difficile.» «J’ai l’impression que tu es triste.»

Vous pouvez lui faire savoir que vous êtes présent pour lui, que vous voulez être un soutien pour lui. Par exemple :

  • « Merci de te confier à moi. Je suis là pour toi.
  • Si vous êtes inquiet à son sujet, demandez : « Est-ce que tu penses au suicide ? ». 

Etape 3 : Ne banalisez pas son ressenti

Il n’est pas simple de se confier à quelqu’un, il est donc important que vous preniez les propos de la personne au sérieux et sans jugement. Évitez des phrases telles que:

  • « Ça va aller. Les choses vont s’arranger »,
  • « La vie est trop courte, pense à tes enfants »,
  • «Tu es quelqu’un de courageux donc il faut que tu te bouges».

Etape 4 : Témoignez-lui votre inquiétude

Il est possible que cette personne pense ne pas avoir de valeur ou être un fardeau pour ses proches. Lui démontrer combien elle est importante pour vous et pour les autres pourrait l’aider à se sentir mieux.

Ce que vous pourriez dire:

  • «J’aime passer du temps avec toi.»
  • «Je suis là pour toi.»
  • Si elle cherche à minimiser ou nier son état, «Je m’inquièterais moins si tu me disais comment tu vas et si tu me demandais de l’aide.»

Évitez cependant de la faire culpabiliser en disant :

  • «Tu as tellement de raisons de vivre»
  • «As-tu pensé à la douleur de ta famille? »

Etape 5 : Ne promettez jamais de garder le secret

Cherchez ensemble les personnes qui pourront l’aider. Mieux vaut lui expliquer que ce n’est pas par trahison mais plutôt par inquiétude et que vous avez besoin d’en parler à d’autres personnes, professionnels ou non.

Etape 6 : Respectez vos propres limites

Vous êtes un ami, pas un thérapeute. Encouragez-le à s’ouvrir à d’autres personnes comme «À qui d’autre en as-tu parlé ?». Vous pouvez appelez ensemble le numéro national de prévention du suicide au 3114. Vous pouvez l’accompagner dans la prise d’un rendez-vous auprès d’un psychologue, l’accompagner physiquement au rendez-vous pour le soutenir. Puis, à la suite de cette conversation, et si vous vous en sentez capable, maintenez un contact. «Comment te sens-tu aujourd’hui?».

Si la personne planifie de façon imminente de mettre fin à sa vie, appelez le 3114, et efforcez-vous de ne pas le laisser seul.

VIGILANCE !!! 

Offrir du soutien à une personne qui vit des difficultés peut être très valorisant. Toutefois, on peut rapidement ressentir de la fatigue, voire de l’épuisement. Pour arriver à rester disponible pour l’autre, il est essentiel de prendre soin de soi et de respecter ses limites. Il est donc important que vous: déterminiez jusqu’où vous pouvez apporter votre aide, ne fassiez pas de promesse intenable, vous accordiez des moments de repos où vous pourrez penser à autre chose, cherchiez le soutien de votre entourage, contactiez le 3114 ou un psychologue pour vous, en cas de besoin.

Prenez soin de vous.

 Lucille Courtot
Psychologue clinicienne